Contre le génocide en Palestine, pour un cessez le feu permanent et des sanctions contre Israël.
La décision prise par la direction de notre parti de ne pas signer pour l’instant l’appel à manifester initié par le Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens, dont EELV est membre fondateur, est une erreur. En cause, l’emploi du mot génocide. Si elle devait se confirmer, elle s’inscrirait dans la continuité d’une communication erratique de notre direction sur le massacre en cours à Gaza, qui a d’abord commencé par reprendre l’antienne de la propagande pro-israélienne « Israël a le droit de se défendre », avant de réclamer un cessez-le-feu immédiat et permanent, pour finalement nous désolidariser des autres membres du Collectif en refusant de signer l’appel à manifester samedi 9 mars sur les mots d’ordre : GAZA : STOP GÉNOCIDE ! CESSEZ-LE-FEU PERMANENT ! ASSEZ DE DÉCLARATIONS ! SANCTIONS CONTRE ISRAËL !
Cette décision reviendrait à ignorer le jugement de la Cour de Justice Internationale qui a donné raison à l’Afrique du Sud, soutenue par une grande partie des États du Sud global, qui accuse Israël de manquer aux obligations qui lui incombent au titre de la Convention de 1948 sur le génocide, qui interdit le crime de génocide, oblige à le prévenir et à le sanctionner. Ce qui signifie aussi que sauf à mettre en place les mesures conservatoires requises, le crime de génocide serait caractérisé. D’ailleurs dans le communiqué de presse que la direction a pris soin de rédiger pour appeler à rejoindre la manifestation sur ses propres mots d’ordre, elle rappelle l’ampleur du massacre et des destructions provoquées par l’offensive israélienne que pour autant elle refuse de qualifier de génocide.
Rappelons que les jugements de la Cour Internationale de Justice ont une valeur contraignante et qu’en l’occurrence, celui-là s’impose non seulement à Israël, mais à toutes « les parties contractantes » de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. Au lieu de cela, la France qui s’était pourtant engagée, fin janvier 2024, à respecter la décision de la Cour Internationale de Justice, a déclaré qu’elle entendait présenter des observations sur l’interprétation par la Cour de la Convention. Ce qui signifie, dans un langage diplomatique qui laisse peu de doute sur son interprétation, qu’elle ne reconnaît pas le risque de génocide et n’entend pas prendre toutes les mesures qui sont raisonnablement à sa disposition pour en prévenir le crime.
Si elle devait confirmer son refus de signer l’appel du Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens, la direction de notre Parti prendrait la responsabilité de s’aligner sur la position du gouvernement. Ce qui apparaîtrait comme une susceptibilité à un agenda politique aveugle aux relations coloniales de domination capitalistes, entamerait notre crédibilité auprès des anciens peuples colonisés, qui forment l’essentiel du Sud global, et de leurs diasporas chez nous qui contestent la légitimité d’un ordre du monde dominé par les intérêts occidentaux. Cette décision qui participe clairement d’une stratégie de conquête d’un électorat centriste moins sensible à ces questions, contribuerait à nous aliéner l’électorat populaire issu des anciennes colonies.
Plutôt que de nous laisser emporter par la propagande médiatique qui vise à minorer les crimes perpétrés à Gaza, dans une entreprise de manipulation de l’opinion publique, nous devrions éclairer cette même opinion publique sur le caractère colonial de la guerre que mène Israël contre la population de Gaza, qui s’étend en Cisjordanie et, maintenant, dans le sud du Liban. Israël mène une guerre coloniale d’appropriation d’un territoire qui va du Jourdain à la Méditerranée, revendiquée depuis longtemps par l’extrême droite israélienne et, maintenant ouvertement par des gouvernants et responsables israéliens. Ce n’est pas un hasard si les anciens pays colonisés soutiennent à peu près unanimement la démarche de l’Afrique du Sud. Ils savent d’expérience ce dont il est question.
Plutôt que nous laisser prendre par des arguties qui n’ont d’autre intention que de réifier des catégories du discours dont nous savons pertinemment qu’elles ne sont pas fondamentalement en cause ; juif·ves, arabes, musulman·es, notre rôle est de rappeler que si la religion et/ou l’ethnie sont des registres de mobilisation disponibles, ils sont au service d’un agenda politique impérialiste qui voit s’affronter des empires dans des guerres de prédation qui ont déjà conduit à l’effondrement de plusieurs sociétés où les gens vivent dans une insécurité permanente.
Car l’enjeu du conflit réside dans la conquête militaire du territoire palestinien et de ses richesses : l’eau, la terre et le gaz. Pour preuve l’accord tripartite qu’Israël a récemment signé avec l’Egypte et l’Union Européenne, après avoir découvert d’importants gisements de gaz au large de ses côtes, qui le place en position de devenir un acteur stratégique majeur dans la fourniture de gaz, d’autant plus important pour l’Europe que nous sommes engagés dans une réduction de notre dépendance au gaz russe. Pour preuve encore, le fait qu’Israël vient d’accorder des permis d’exploration à plusieurs compagnies gazières, dont l’italienne ENI, dans les eaux territoriales palestiniennes, là encore, en violation du droit international.
Dans ces conditions, l’appel du Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens, à manifester pour exiger de notre pays et de l’ensemble des pays occidentaux qu’ils engagent des sanctions diplomatiques, économiques et militaires contre l’Etat d’Israël afin de satisfaire à leur obligation de prévenir le génocide du peuple palestinien, est un des moyens légitimes à notre disposition pour réclamer l’application du droit international et dénoncer l’alignement diplomatique croissant de la France avec l’Union Européenne sur les intérêts des Etats-Unis et sa logique impérialiste.
Par conséquent, nous considérons que la responsabilité des écologistes consiste à ne pas se désolidariser des autres membres du collectif et à signer son appel à manifester samedi 9 mars à 14H sur les mots d’ordre : GAZA : STOP GÉNOCIDE ! CESSEZ-LE-FEU PERMANENT ! ASSEZ DE DÉCLARATIONS ! SANCTIONS CONTRE ISRAËL !
Nous espérons que la direction d’EELV – Les Écologistes entendra nos arguments et signera cet appel. Dans l’attente et pour ce qui nous concerne nous sommes solidaires de l’appel du collectif pour une paix juste et durable entre palestiniens et israéliens.